Avec plus de 40 abonnés au téléphone, le lotissement de la Perreuse est devenu le lieu le plus peuplé de Saint-Firmin-des-Bois alors qu’il y a 30 ans le bois de la Perreuse était un des plus répulsifs de la Commune.
Ce changement incite à tourner ses regards vers ce quartier : ses composantes naturelles, ses chemins pour randonneurs attentifs, ses écarts et les souvenirs qui peuvent s’y rapporter.
Une ligne boiséeInitialement, le bois de la Perreuse faisait partie d’un alignement boisé sur le sol à silex accompagnant le versant rive gauche du rû de Pont Guinant, autrefois dit rû du Perroy ou de St-Firmin, dont le couloir était jadis appelé la Grande Vallée. Il est arrivé, soit dit en passant, que l’eau du rû ait été assez abondante et violente pour emporter une diligence et ses chevaux sur la route de Châteaurenard-St-Germain-des-Prés, et noyer voyageurs et conducteur. La ligne boisée voisine a d’abord été défrichée en venant du Sud par le domaine gallo-romain de Gaudigny, situé au sud-ouest de Champourcin, auteur de la terre à blé des Bolletins, mais laissant plus au nord un sol caillouteux, sens des Chaillots, voire couvert de friches, sens des Brosses. En fin de compte n’a subsisté que le massif formé par le Bois de la Perreuse (Petrosa, le bois pierreux) et le bois de la Motte, laissant d’un côté le bois Bidault, naguère réserve de lapins de garenne le long du rû de Glanderelle et de l’autre les bois des Parnets et Chalerets, autrefois secteur du gros gibier, tel le bois de la Bête s’appuyant sur le rû de l’aiguillon (diminutif d’aqua : la petite eau). |
VillevôqueEn ce secteur tenu pour giboyeux a été créé vers 840 un domaine réservé aux dirigeants du diocèse de Sens et appelé villa episcopi, villevôque en français. Ce don d’une fille de Charlemagne a été utilisé à plusieurs reprises par les archevêques de Sens pour recevoir le Comte Renard pénitent en 977, puis après une intronisation à Gy en 1001, et à la fin du même siècle pour la consécration de l’Eglise de Saint Sébastien (alors paroisse) sur Châteaurenard. Le petit bois à droite en allant des petits Chalerets aux Parnets correspond à l’ancien site du château (aux douves encore visibles avant 1940). Mais depuis le 15ème siècle, moment où un nouveau venu chaceré (altéré depuis en chaleret) l’habite et y plante des poiriers d’Angoisse (espèce en provenance d’Angoisse en Limousin et représentée du verger conservatoire de Châteaurenard), ce n’est plus un château. |
Le Bois de la Perreuse et son voisinDès l’époque féodale ce massif boisé a été non seulement divisé en deux, mais les deux parties volontairement séparées par une bande dénudée de 150 mètres de large. Ce couloir déboisé a immédiatement attiré l’eau des pentes de Bellevue et des Romains et a été baptisé successivement l’Entonnoir, puis l’Abîme, et la maison (aujourd’hui disparue) située à son entrée dite Marion la Crottée par la terre ainsi amenée. Vers le bourg, c’était le bois de la Motte appartenant au Seigneur de St-Firmin, et vers l’aval de la Perreuse proprement dite aux mains des Châtelains de Châteaurenard qui s’y sont interessés. Ainsi vers 1300 Mahaut d’Artois fit refaire depuis la Mouloire le chemin y menant jusqu’à la Croix Blanche et qui en a conservé le nom de « Chemin d’Artois » et, quand Châteaurenard devint propriété royale le nom de Cour le Roy fut donné à la Résidence du garde-chasse devenue en 1541 la Croix Blanche. Les rapports semblent avoir été défiants entre les propriétaires des deux bois jumeaux : encore en 1845 Le Pelletier des Forts, de Châteaurenard, incitait Faffe, son garde-chasse établi à la Croix Blanche, à surveiller de près Bouvier de la Motte, de St-Firmin ! |
Chemins pour randonneursToute une série d’autres chemins descendent de St-Firmin à l’Ouanne. D’abord les « chemins des ânes », menant aux moulins, par les Millards vers Poussereau, et par Champourcin vers Pouligny. Mais il y avait aussi les « chemins de la Procession ». L’ancien, rectiligne, allant du bourg de St-Firmin à Quezard par la Croix Blanche, menant à Saint-Sébastien, sur l’autre rive de l’Ouanne que les Pélerins passaient pieds nus à la gravière du moulin de Talot. La partie inférieure de ce chemin état dite, rappelant un événement militaire, le « chemin de la Fosse aux Gens d’armes ». Cette fosse n’est autre que le val du petit rû –très court- appelé autrefois la Buire, c’est-à-dire la Cruche, et maintenant le rû des Griboulets. Des cavaliers y auraient eu un mauvais sort après avoir détruit Gaudigny dont la dernière mention comme propriété de Gilles le Hougue date de 1410. Quant au « nouveau » chemin de la Procession, c’était l’actuelle route de St-Germain ; en effet, St Sébastien ayant cessé d’être paroisse, vers 1600 les habitants de St Firmin reportèrent leur manifestation habituelle vers le monastère de Gy. Mais il y avait aussi le « chemin des Perdreaux à la Mouloire », dont la partie inférieure était dite « chemin du Marchais Ferré », mare située aux Boyers- portait le nom de « chemin vert » et « chemin herbu ». Le chemin de Montargis à Triguères passant par Beaune, la limite enter St-Firmin d’une part et St-Germain puis Châteaurenard d’autre part, et ensuite les Motteaux (et évitant effectivement Châteaurenard). Enfin, le « chemin du Perroy à St-Germain » a été un repère lors du repeuplement de la campagne après la guerre de cent ans. |
Le village des Chaillots et la maison de Montenteaume.C’est en effet dans la période 1450-1480 que se sont échelonnés les familles Boyer, Chaillot et Milard qui ont recréé les hameaux qui se suivent 500 mètres au sud du bois de la Perreuse. De ces hameaux, le principal a été celui des Chaillots, longtemps le plus peuplé sur la Commune de St-Firmin avec 13 maisons, une communauté institutionnelle encore citée en 1845, « une place de village », avec croix et une fête annuelle (mais dont nous ignorons la date). Ici les nouveaux venus avaient pris le nom de la caractéristique du lieu (comme cela arrivait jadis à beaucoup d’immigrants) avant de le laisser au hameau, leur œuvre. |
Mais le cas le plus singulier, le plus original est celui de Champourcin par lequel nous terminerons ce tour du quartier de la Perreuse. Ce lieu était la Baraterie au Moyen-Âge, mais après les destructions de la guerre de Cent ans, les petits seigneurs de la Motte de St-Firmin résolurent de la reconstruire. Ils s’appelaient Montenteaume, Jacques puis son fils Guillaume, du nom de la hauteur dominant le bourg de St-Germain des Prés dont ils étaient originaires. Non seulement La Baraterie prit leur nom, mais quand le lieu devint Champourcin la maison qu’ils avaient construite garda l’appellation de « masure de Montenteaume ». C’est cette maison qu’il y a 25 ans environ M. Bertrand-Lassailly a rénovée et déplacée, la fixant au dessus de Triguères, dans le coude de la route y menant à Rougerie. Voilà donc une illustration toute trouvée pour le quartier de la Perreuse. |
Paul Gache